journal ---- 08 Oct 1987 grand-sédimental ---- 08 Oct 1987

C'est quoi cette rubrique ?

C'est un journal retro putatif écrit aujourd'hui pour des évènements datant d'il y a mille ans. Tous les jours je pense à ce que j'aurais écrit dans mon journal il y a 30 ans. Si la vie est un gruyère, seuls les trous sont ici évoqués.

 

1987/10/08

 

J'ignore toujours pourquoi il nous faut absolument jouer au handball alors que personne ne joue au handball pour son plaisir dans la classe, que je sache. Je manie latéralement mes jambons perdus dans un jogging flasque dans l'espoir que personne ne me passe la petite balle absurde, au toucher rêche, qui ne vole ni ne rebondit comme il conviendrait à une balle digne de ce nom. Le handball est au basket ce que les choux de bruxelles sont aux petits pois. C'est pas pour autant que je reprendrais des petits pois à la cantines et il est donc heureux que personne ne me passe la balle. En revanche je commence à me demander pour quelle raison, depuis que je nage comme un forcené deux fois par semaine depuis 2 ans au club de natation de la piscine d'O, aucun autre nageur ne m'a jamais adressé la parole, ni même le barbu antipathique qui donne les consignes au début de l'entrainement. Dès l'instant que j'ai enlevé mes habits et exposé mon corps flasque, je deviens un fantôme. Se pourrait il que je sois l'enfant invisible ? Se pourrait-il que des super pouvoirs m'aient été accordés ? Ce serait tellement plus commode. Comme je me cogne assez souvent aux uns et aux autres dans le bassin, soit parce que je me suis trompé de ligne à cause des lunettes qui sont toujours à moitié embuées soit parce que je suis doublé par un de ces types au ventre plat qui donnent l'impression sous l'eau d'être des longs chiens aux museaux pointus qui pétillent en surface tandis que moi pauvre patate carbonisée je m'escrime à deux à l'heure dans les remous, m'est avis que je suis tout ce qu'il y a de plus concret. Si j'avais des super pouvoir d'ailleurs je me choperais pas une othithe en remontant dans le bus.

J'ai hérité d'une radio toute plate et des écouteurs pas chers en cadeau pour un abonnement à un journal. Hier soir je suis sorti dans le froid pour voir les étoiles depuis le jardin. Tout en écoutant la radio. C'est formidable. Entre deux passages d'avions, j'entends superbement la musique et je regarde les étoiles. A quel point les astres sont alignés, je l'ignore mais ce qui est certain c'est que la chanson lancinante de Stevie Wonder est arrivé opportunément pour me faire venir un moment bizarre. Il hurle dans mes oreilles qu'il est libre tandis que, à moitié gelé, en raison de mes habits qui ne fonctionnent pas, je vois scintiller toutes ces étoiles. Et la radio est tellement nulle qu'elle s'arrête au bout de quelques minutes. Piles à plat, j'ai froid, je suis seul, désemparé sous les étoiles. Je rentre fâché dans ma chambre en bordel.

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