ignorance-active ---- 14 Aug 2021
 

C'est quoi la société de contrôle ?

 

Là nous faisons le point sur la société de contrôle.

Le point d'entrée décisif pour aborder la question n'est pas théorique mais pratique. Personne ne souhaite vivre dans une société de contrôle pas plus qu'on ne souhaite écorcher les bébés phoques à vif. La plupart du temps.

Mais une fois que l'on a fait se dissoudre le bébé de la pensée politique dans l'eau du bain tiède de la petite vie mesquine, la société de contrôle peut s'établir sans que la majorité des gens ne s'en rendent compte. Ainsi ce qui me semble caractériser la société de contrôle ce n'est pas le contrôle opéré mais l'absence de réaction au contrôle. Et le phénomène est stupéfiant.

C'est d'un fantôme dont vous me parlez ? demande l'homme à qui l'on montre les hauts murs et qui ne sait plus qu'il est en prison. Il faut du reste se figurer que le moment a quelque chose de singulier qui n'était pas complètement pressentis par les Deleuze et les autres : la coercition n'a même pas besoin du mot d'ordre. Cela fonctionne tout seul sans que ni la question d'un dissensus ne soit posée ni la réponse consensuelle ne soit donnée.

Le mot d'ordre c'était au départ, si je comprends bien, une sorte de principe d'insouciance communicative transmise à des masses passives par l'ensemble des canaux qui ne touchent pas au sens directement, de manière explicite, c'est à dire tous les canaux qui restent lorsqu'on a ôté les livres. La publicité, les simplifications dans le journal léger, ce genre de choses. Il a même existé une époque où des intellectuels se demandaient ce que pouvait être cette manière d'énonciation portant message mais dissimulant le code, rompant le contrat entre le signe et son interprétation et d'assimilier cela à de la propagande, la propagande du nouveau monde du commerce des marchandises sans soucis. Qui se soucie encore de cela en dehors des historiens du marxisme et des trois rebelles partis en thébaïde ? Comme dit la vulgaire expression, désormais l'enrobage du mot d'ordre, ça passe crême. Alors ce mot d'ordre, maintenant que le monde perceptible semble avoir perdu toute forme d'impermanence cognitive pour la majorité des hommes blancs, maintenant que tout un chacun ne voit plus rien d'anormal ou d'étrange à ne voir et respirer que des productions physiques ou intellectuelles qui ont été normalisées à grande échelle en vue de maximiser disons ce qui est fluide et positif en toute chose, maximiser les profits c'est à dire, maintenant que la majorité des gens se promènent le nez sur leur téléphone sans regarder quoi que ce soit autour d'eux, à moins qu'un ours ou un femme nue ne leur barre le chemin, ce mot d'ordre qu'est-il devenu ? Aurait-il disparu, par un étrange hasard ? Le phénomène se déploie devant les yeux de qui veut les ouvrir, d'un consentement généralisé à la marche dépolitisée des choses et, ce qui est frappant, ce consentement fonctionne toujours même lorsque la marche dépolitisée des choses rencontre un problème qui demanderait un travail de conscience collective, ainsi cette pauvre histoire de COVID qui a bon dos ou cette plus grande histoire, vous savez, dont le sujet est la disparition de l'espèce humaine le temps de quelques battements d'ailes de papillon. On aurait pu supposer que ce consensus mou aurait démontré ses limites en cas de problème et que toutes les institutions qui organisent cette anesthésie politique eussent explosé naturellement... Eh bien il n'en n'est rien. Les banques peuvent se payer sur les impots sans qu'aucun bien ni aucune personne ne soit inquiété. Les pires voleurs, les pires menteurs, les pires criminels peuvent rester dans l'espace public et recueillir pour toujours les suffrages des masses. Le consentement se produit donc sans qu'aucune réalité, aussi contradictoire et funeste soit elle, ne vienne le pertuber. Cela va même encore plus loin prévu : ce même consentement mou qui enjoint chacun à vivre son petit coma personnel peut aussi bien se transformer en coercition effective et comme nous avons vu, mettre au pas des sociétés entières, les contraindre, les soumettre et les priver liberté avec plus d'efficacité qu'un régime autoritaire classique. Se trouver un peu gêné de penser que les banques en faillite puisent dans les poches des finances publique, c'est une chose, voter pour un idiot utile qui va raconter des énormités populistes en agitant ses petits bras, c'est une chose, mais se trouver assigné à résidence pour des raisons quelque peu troubles et la plupart du temps sans débat public, c'est bien autre chose. Pourtant là encore, aucune révolte n'advient en dehors de quelques opportunistes et idiots encore plus utiles. C'est pour le moins énigmatique.

J'ai l'intuition que simplement le nombre de singes totalement idiots, y compris parmi les élites, est deveny tel que les mécanismes de propagande n'ont plus besoin d'être activé, positifs, explicites. Cela se produit sui generis par la force de cette idiotie particulière qu'est devenu l'intellection de chacun à l'ère de l'hyper connection aux soit disant réseaux, où il s'agit en somme de se figurer le moins de choses différentes possibles en effectuant un nombre maximal de gestes nommés clics, like, follow et toute cette syntaxe. Selon cette hypothèse, ce n'est pas qu'il n'y a pas de réaction à la société dite de contrôle, c'est plutôt que la réaction se déroule dans un espace qui manque de rapport avec la réalité sociale réelle, celle qui détermine effectivement la place et les rôles de chacun selon un certain nombre de règles ou usages sociaux. Cet espace est de nature à détourner l'attention de ce qui faisait encore sens avant ce nouveau régime de recouvrement virtuel au profit d'un renfermement collectif à l'interieur de ce qu'on a appelé très justement des bulles, des bulles tous à fait transparentes en effet où rien, comme dans les prisons imaginaires de Foucault, n'est caché. Rien sauf peut-être, ajouterais-je, les murs, et ajouterais-je encore, les gardiens. Ni mot d'ordre, ni mur, ni gardien dès lors que les détenus sont plongés dans une impasse cognitive qui leur barre tout accès à une pensée critique véritable. Si je dis qu'il n'y a pas de gardien, du moins pas dans les sociétés dites démocratiques, c'est parce que le consentement est tel qu'il n'y en a pas besoin probablement. Il y a encore ça et là des pantins politiques apointés qui expriment encore la nostalgie du monde positivement autoritaire et, me semble t il, en contradiction complète avec le sens passivement autoritaire des choses, envoient des mots d'ordre à la télévision et la police dans la rue avec ce projet anachronique de frapper les gens avec des matraques véritables. Je pense que ce n'est pas le fait majeur des nouvelles sociétés de contrôle mou, plutôt une curiosité locale assez typique de ce petit pays désormais honteux que l'on nomme France et qui m'a toujours paru nostalgique du système féodal.

Les faits sont les suivants. Idiots ou pas, les relations de pouvoir sur ce tas de merde cernée d'eaux plus ou moins chaudes sont définies globalement par ce que la philosophie politique nomme un système oligarchique. Le fait majeur qui m'intéresse ici, ce n'est pas ce système plutôt qu'un autre, ni le fait que la répartition des richesses soit par exemple plus inégalitaire encore qu'au moment où les révolutions socialistes étaient en train de se former, ce qui m'intéresse c'est de comprendre pourquoi il n'y a semble t il pas besoin de roi et de prince, de gardiens et de milices pour permettre à ceux d'en haut de contraindre ceux d'en bas. Eh bien mon intuition reside en ceci que ni les uns ni les autres n'ont l'impression d'une contrainte ou d'un problème sérieux. Pourquoi, comme le font les aliénés sur lesdits réseaux, penser que les milliardaires se mettent ensembles pour prendre des décisions secrêtes qui seraient ensuite transmises à leur courroies de transmission politiques et législatives ? Pourquoi ne pas penser plutôt qu'ils sont tous des ignorants qui ne lisent aucun livre, ne regardent pas vraiment par la fenêtre de leur yatch, surfent pareillement sur les reseaux dits sociaux pour rire des photo montages débilitants ? Ils suivent la pente facile de leur intérêt sans forcément penser plus loin. Le plus fort de la théorie possible réside semble t il dans cette idée que la machine de guerre commerciale a eu pour conséquence le confort pour un plus grand nombre de gens, ce qui est exact à quelques détails, ces détailsqui créent des millions de pauvres en mauvaise santé et des lieux de vie ineptes. Certes on peut supposer avec preuves et raison que ces gens de pouvoir matériel envoient leur émissaires spirituels pour dispenser à grands frais des nouvelles favorables au sujet de leurs activités lucratives, comme par exemple que le tabac est bon pour la santé, que le plastique est indispensable, que le pétrole est abondant et ainsi de suite.... mais pourquoi penser qu'ils lisent Machiavel ou Platon ou que la moitié d'une de ces idées politiques déjà historique et littéralement balayées par la crétinerie individuelle et générale ne fasse partie d'un plan quelconque ? Le complotisme c'est chic mais purement nostalgique, je le crains.

On pourrait prendre cet exemple révélateur du COVID qui a démontré le pouvoir coercitif de ce nouveau système sans forme institutionnelle claire. Pourquoi penser que les fabriquants de médicaments auraient mutatis mutandis une approche au monde différente des vendeurs de sucre ou de n'importe quoi d'autre ? Pourquoi penser qu'ils font de la propagande au sens classique du terme, en pleine connaissance du mécanisme, quand il leur suffit d'affirmer quelques vérités publicitaires que l'immense majorité des consommateurs ou de leur soi disant représentants politiques n'iront pas vérifier, occupés que nous sommes tous à cliquer sur les pensées toutes faites au lieu d'en avoir ? De fait dans cet exemple, tous les éléments de la chaine de responsabilité intellectuelle qui partent d'une réalité sanitaire, soit un virus nouveau, fortement transmissible, surtout dangereux pour les primo infectés d'un certain age ou déjà malades, jusqu'à en arriver à une série de décisions politiques coercitives qui ne montrent pas d'efficacité particulière lorsqu'on compte les morts dans les registres officiels à la fin, tous, tous, témoignent d'un défaut global d'ambition cognitive, et cela est valable non seulement du côté des aliénés qui montent en épingle leurs capacités analytiques binaires mais aussi du côté de ceux qui, tout en étant prétendument des gens de science, n'ont pas eu assez de discernement pour produire autre chose que des informations arrangeantes pour les marchands en tous genres et pour les politiques en mal d'authorité. Si la santé publique étaient à ce point une priorité, le tabac serait interdit de vente et nombre de produits massivement délétères le seraient aussi. En somme, nous sommes devenu tellement cons que nous n'avons même plus besoin d'être fascistes pour nous nuire. Un consensus mou s'établit et dès lors chacun trouve que la prison est sucrée.... Je doute d'ailleurs que de nouveaux régimes fasciste traditionnels reprennent un jour le pouvoir tant est misérable le niveau de discernement du réel, y compris chez ces méchants. Tout au plus peut on supposer que le sentiment d'inaccomplissement général enjoignent des gens chagrins à voter pour des pantins un peu plus épicés que le reste de la boite à marionnettes sucrées, mais je ne vois pas comment cette misère des rapports pourrait entrainer la mise en oeuvre d'un projet politique fasciste à l'ancienne. C'est également un travail que d'être fasciste et de convaincre les gens de leur supériorité par rapport à x ou y.

Alors la révolution que je propose, dans ces conditions, sera une révolution qui reprendra les armes de l'ennemi mou, soit une révolution molle. Sans manifestation, sans bruit, sans violence. Il s'agit de faire s'écrouler l'empire du vide et du rien en faisant le vide avec tout ce qui ne vaut rien pour mener une vie d'être vivant. Je vais bien rire quand je relirai ces lignes, et merci à toi, imbécile du futur, de me distraire par anticipation. Donc pour l'instant on prend rendez vous pour le manuel pratique de la révolution statique, à mettre en ligne ici avec les autres poubelles de ce blog, quand j'aurais fini tout ce que j'ai à faire pour avoir le droit d'assoir mon cul ailleurs que par terre, non loin d'un cimetière.

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